J’ai une parole pour toi” (Méditation d’Esaïe 28.1-13)

Il n’est pas évident de méditer un extrait d’un livre prophétique de 66 chapitres. Mais ce chapitre 28 du livre d’Esaïe décrit des phénomènes sociaux et humains si proches de ceux que nous connaissons aujourd’hui (cynisme généralisé, démission morale des classes dirigeantes, fuite des réalités au moyens de psychotropes), qu’il m’a paru intéressant de regarder de près ce passage…

Pour situer un peu… (1-6)

Les paroles prononcées par le prophète Esaïe situe la scène avant la chute de la ville de Samarie (721). Ephraïm (v.1) est un autre nom pour désigner le royaume du nord (Israël, royaume du Nord, s’étant séparé politiquement de Juda, royaume du sud – avec Jérusalem comme capitale, en 933). La prophétie s’adresse ici aux classes dirigeantes de Samarie. Esaïe met notamment en garde le royaume du nord et son roi Achaz contre les conséquences d’une mésalliance avec l’Assyrie (Irak). Ce sera le début de la fin ! Une fois Samarie, capitale du nord, tombée aux mains de l’ouragan Sennachérib (v.2), plus rien n’empêchera Juda de tomber (même si, dans les faits, un sursis sera accordé à Jérusalem qui repoussera l’assaillant Assyrien en 701, vingt ans après la chute de Samarie). Mais une autre voie reste possible, celle de l’écoute des paroles du prophète de Dieu.

Arrêtez de boire !

Certes les coteaux de Samarie produisaient un vin d’excellence. Mais cela ne peut constituer une excuse valable à l’alcoolisation généralisée des dirigeants politiques et religieux de Samarie (v.7) ! Il y a toujours une explication à l’alcoolisme. On porte souvent un jugement moral sur la maladie alcoolique, considérée comme un vice, alors qu’elle est avant tout une fuite de la réalité, une peur assortie d’une « solution ». Quand la réalité devient trop angoissante, on boit un coup et ça va mieux… Le problème avec l’alcool, c’est qu’il faut sans cesse augmenter la charge pour se sentir moins chargé ! « Vous êtes assommés par le vin ! » (v.1), constate Esaïe. Les responsables politiques et religieux devant leur incapacité à diriger le pays, se réfugient dans l’alcool au point de s’abrutir, de raconter n’importe quoi au peuple (v.7).

Délires alcooliques (9-11)

Les prophètes, les prêtres et les politiques ensemble, avec l’assurance que procure l’alcool, mettent en question l’enseignement d’Esaïe de façon très perverse. Imbibés et désinhibés à la fois, ils l’accusent d’être un peu « léger ». Ses prophéties sont tout juste adaptées à une classe d’école biblique première section ! (v.9). Langue chargée et maxillaires anesthésiés (v.11), les voici caricaturant en un babillage incompréhensible le message du prophète : « saw lasaw, qaw laqaw… ». On pourrait traduire « blablabla ! » en rapport avec le langage haché évoqué au verset 11 ; ou encore « B et A, BA » pour coller au reproche d’enseignant pour débiles. Plus précisément, le mot hébreu saw est une contraction du mot commandement et qaw veut dire la ligne, le fil à plomb : « Arrête de nous donner des leçons de morale et  prophétise ! ». L’heure est au cynisme. Le Seigneur ne supportant plus ce langage, il s’apprête à répondre.

Quand le vin est tiré, il faut le boire (11-13)

Puisque les responsables s’enferment dans le cynisme, Dieu va leur parler le langage qu’ils maîtrisent, celui de la raillerie ! C’est la plus terrible des punitions. Dieu parle et l’on ne comprend rien. Quand Dieu se tait, encore… on peut attendre. Mais quand il parle un langage incompréhensible, cela veut dire qu’il nous est devenu étranger. Quelle terrifiante réalité !

Il y a un urgent  travail de parole à faire !

Tout au long de l’histoire, Dieu n’a jamais cessé de chercher les hommes. Il a choisi de les trouver par le moyen de sa parole, parce que la parole est le seul média suffisamment puissant pour impacter l’humain en profondeur. Que ce soit pour restaurer la dignité (v.5), la  paix et le repos (v.12), que ce soit pour juger et punir (v.11), la parole accomplit toujours son œuvre (voir le magnifique passage d’Esaïe 55.10-11).

Aujourd’hui, dans un monde où la parole est rare, où le cynisme et le maniement de la langue de bois atteignent des hauteurs rarement égalées, il y a un urgent travail de parole à faire. Dieu parle aujourd’hui ! C’est bien ce qu’affirme l’apôtre Paul en 1 Corinthiens 14.21,  citant ce passage d’Esaïe 28.10, et demandant instamment que l’on cesse d’utiliser dans l’Eglise un langage incompréhensible.

Un repos bien immérité !

En Jésus-Christ, Dieu parle clair désormais ! Que dit-il ? Il dit : « Voici le repos. » (v.12). Il dit encore dans l’Évangile par la bouche de Jésus : « Venez à moi, vous tous qui êtes chargés et fatigués, je vous donnerai du repos » (Matthieu 11.28). Que cette parole transforme ton cœur ! Amen !

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